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Afrique du Sud: Ramaphosa, l’homme qui marche sur un fil de rasoir


  8 Avril      117        Politique (25317),

 

Par Abdelghani AOUIFIA

Rabat, 08/04/2019 (MAP)- Trônant sur un pays plombé par une profonde crise économique et sociale et un parti de l’ANC gangréné par les divisions, Cyril Ramaphosa semble marcher sur un fil de rasoir dans son combat visant à restaurer l’image ternie du pays de l’icône Nelson Mandela.
Porté à la présidence de l’ANC fin 2017 et à la magistrature suprême du pays en février 2018, ce brillant homme d’affaires et ancien leader syndicaliste que Mandela voulait imposer comme son successeur livre son combat sur de nombreux fronts: de la corruption, à la réforme économique en passant par la modernisation d’un parti qui ne fait plus l’unanimité parmi un électorat plus que jamais désillusionné par une succession d’échecs.
L’environnement général qui encadrait l’arrivée de Ramaphosa au pouvoir était celui de l’incertitude. Une incertitude qui aggravait des tensions sociales et semblaient conduire le pays vers l’implosion. L’éviction de l’ancien président Jacob Zuma, embourbé dans de nombreux scandales politico-financiers, offrait une issue permettant au moins de contenir la tension.
Sous Zuma, dont le bilan est assimilable à une «décennie perdue» (2009/2018), la corruption a atteint les plus hauts sommets de l’Etat au point de faire l’objet de plusieurs livres d’investigation ayant dévoilé, entre autres, des liens douteux entre l’administration Zuma et les Gupta, une famille de richissimes hommes d’affaires d’origine indienne. Le fléau a rattrapé la quasi-totalité des entreprises publiques, dont la South African Airways et la compagnie nationale d’électricité (ESKOM), les poussant au bord de l’effondrement.
Sur le plan politique, les divisions au sein de l’ANC ont atteint des proportions alarmantes, les différentes factions se livrant à de véritables guerres d’intérêts et d’influences.
Ce cadre peu confortable a eu comme résultat une dégradation de l’économie avec une perte de la confiance des investisseurs. Le pays s’enlise depuis 2013 dans un ralentissement économique qui renvoie aux calendes grecques les ambitions de longue date de l’ANC de résorber les énormes déficits sociaux.
Le chômage se situe à plus de 27 pc de la population active, selon les chiffres officiels, au moment où des sources indépendantes estiment que ce taux grimpe à plus de 60 pc parmi les jeunes dans les zones défavorisées où vit la majorité noire. La pauvreté s’installe à plus de 50 pc de la population globale d’environ 58 millions d’âmes. Les disparités demeurent, quant à elles, parmi les plus graves dans le monde d’aujourd’hui.
Tel est l’héritage que Zuma a légué à Ramaphosa, dont l’arrivée au pouvoir a suscité une vague d’euphorie et d’optimisme: la Ramaphorie.
Durant les semaines qui ont suivi son investiture, le nouveau patron de l’Union Buildings (quartier général du gouvernement à Pretoria) a multiplié les initiatives, d’une part, pour redonner confiance aux Sud-Africains et, d’autre part, pour remettre l’économie malade sur le chemin de la reprise.
Des commissions d’enquête ont été mises en place pour faire la lumière sur les grosses affaires de corruption. Un ambitieux plan visant à drainer 100 milliards de dollars d’investissements sur les cinq prochaines années a été dévoilé. Un sommet visant à trouver des solutions au chômage a été organisée, et un plan de réforme foncière a été lancé.
Cependant, à l’approche des élections générales (législatives et provinciales), prévue le 8 mai prochain, la tâche de Ramaphosa ne semble pas du tout aisée, les défis étant tellement importants.
L’économie a continué sur sa trajectoire de ralentissement aggravé par une périlleuse crise de l’électricité, au moment où les scandales de la corruption ont continué à ébranler l’ANC, jetant son ombre sur le prochain scrutin et au-delà sur le mandat postélectoral de Ramaphosa.
De l’avis des analystes, la vraie bataille de Ramaphosa est bel et bien menée au sein de l’infranchissable forteresse qu’est l’ANC.
Depuis le début de la campagne électorale, Ramaphosa a été acculé à faire «cavalier seul», se déplaçant à travers le pays pour convaincre les électeurs de son programme. A Soweto, ce vaste township et fief emblématique de la lutte contre l’apartheid situé dans les faubourgs sud de Johannesburg, Ramaphosa a convoqué son plus grand rassemblement, déserté par les membres de l’influent comité national exécutif de l’ANC, plus haute instance décisionnelle du parti. Une absence qui en dit long sur les divisions qui déchirent le parti.
Pour le prochain scrutin, Ramaphosa se fixe comme objectif de dépasser le score de 62 pc réalisé par cet ancien mouvement de libération lors des élections de 2014. «Tout échec donnerait à ceux qui refusent toujours de reconnaître Ramaphosa comme leader l’occasion de tenter de l’évincer après les élections», commente l’analyste Melanie Verwoerd.
Les tentatives de déstabilisation semblent déjà en cours avec l’inclusion sur les listes électorales du parti de responsables liés aux scandales de la corruption.
Des analystes ont interprété l’initiative comme faisant partie d’un plan des factions hostiles à Ramaphosa de saboter son agenda de réforme.
«Les listes de l’ANC sont très révélatrices», explique l’analyste Ralph Mathekga. «Elles montrent que certaines factions n’adhèrent pas à l’agenda de Ramaphosa en particulier concernant la lutte contre la corruption», ajoute-t-il, soulignant que Ramaphosa risque fort bien de se heurter à un caucus divisé dans le parlement qui sera issu du scrutin du 8 mai.
«Il semble que Ramaphosa fait face à une opposition considérable au sein de l’ANC», note Judith February, experte de l’Institut des études sécuritaires (ISS, basé à Pretoria), soulignant que l’avenir de Ramaphosa sera tributaire du score qu’il réalisera lors des élections.
Mais, au-delà du scrutin de mai, le chemin sera épineux pour Ramaphosa, poursuit-elle, avertissant que l’avenir «sera aussi compliqué qu’incertain».
Dans ce climat de tension, les Sud-africains semblent, en dépit des désillusions, prêts à donner à Ramaphosa la chance de conduire le pays avec un mandat politique clair.
A leurs yeux, Ramaphosa représente «le dernier espoir» pour cette Afrique du Sud malmenée, explique Bonang Mohale, directeur général de Business Leadership South Africa, une association qui fédère les plus grandes multinationales présentes dans le pays.
«Ramaphosa pourrait très bien être la dernière chance de l’Afrique du Sud pour corriger sa trajectoire déraillée par un mauvais choix de dirigeants», souligne-t-il.

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