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Bonne gouvernance : Les médias à l’avant-garde de lutte contre la corruption au Niger


  16 Novembre      70        Economie (20921),

 

Niamey, 16 Novembre (ANP)- Au Niger, la presse est en première ligne dans la lutte contre  la mal gouvernance, en particulier la  corruption, et ce, depuis la libéralisation  du paysage médiatique à la faveur de la conférence nationale souveraine en 1991, point de départ de l’ouverture démocratique.

Dans le cadre de leur mission d’intérêt général, les médias se sont trouvés au cœur du combat  contre les pratiques corruptives par le seul fait de délivrer des informations au quotidien   contribuant à dissiper l’opacité  qui fait souvent  le lit des infractions et autres dérives.

De surplus, des enquêtes, des articles reportages de fond, des émissions, des débats sont consacrés au sujet de la gouvernance dans les différents organes de presse au niveau national et local.

Force est de constater que le Niger peine à éradiquer le phénomène de la corruption qui est largement répandue dans la société, comme  l’attestent des rapports de la cour des comptes  et des constats des autres institutions de contrôles mettant à nu des nombreux manquements dans la gestion des biens publics.

Selon le classement de Transparency International sur la perception de la corruption dans le monde,  le Niger se classe  124ème sur 180 pays étudiés en 2022. Le pays obtient ainsi la note de 31/100, selon  l’organisation internationale de lutte  contre la corruption.

Maman Wada, président de  l’association nigérienne de lutte contre la corruption (ANLC/TI), section nigérienne de TI reconnait que  « les médias (…)  sont des acteurs de lutte contre la corruption. Les médias détectent, les médias informent, les médias orientent, et ce travail est important ».

« Nous tous, acteurs de lutte contre la corruption, nous ne pouvons pas réussir sans les médias. Ce n’est pas possible. Las activités que nous menons entre les quatre (4) murs sont connues au niveau des citoyens  à travers les médias »,  fait-il prévaloir.

Les médias nigériens, à la levée du lièvre

« Il y a beaucoup d’affaires où les journalistes ont fait leur travail et ont levé le lièvre », se souvient Elhadj Souleymane Directeur de Publication de l’hebdomadaire Niger Inter.

Pour illustrer le rôle des médias dans la lutte contre la corruption,  l’acteur de la société civile Maman Wada relate : « c’est à travers le journal Le Hérisson que nous avons appris que le concours du ministère de la santé organisé en 2014 a été entaché d’irrégularités ».

« Faisant confiance à l’article, nous avons écrit au Président de la République pour lui notifier des pratiques corruptives qui ont eu cours à l’occasion de ce concours. Et le Président de la République nous a invités à le rencontrer (…)  il a demandé à la Halcia d’ouvrir une enquête », et après des investigations,  « ce qu’on a  découvert, ce sont  des monstruosités », se souvient-t-il.

« Beaucoup des choses graves ont été menées ». Finalement « le concours a été annulé ». Et Beaucoup d’agents de l’Etat ont été poursuivis et condamnés devant des tribunaux ». Tout cela « grâce à un journal », explique le Président de l’ANLC/TI.

« Quand  nous avons des pistes de corruption, nous saisissons les médias pour faire l’investigation. (…) et ce sont les médias qui nous révèlent le contenu caché de ces pratiques corruptives », témoigne l’acteur de la société civile.

En effet, la presse nigérienne a mis à nu plusieurs autres  faits de corruption, de malversations financières ou d’abus de pouvoir mettant en cause des hautes personnalités politiques nigériennes.

Au nombre des  dossiers les plus emblématiques, on peut citer  l’affaire dite ‘’MEBA’’;  l’affaire du fonds d’aide à la presse ; l’affaire ‘’des bébés importés’’ ; l’affaire de ‘’MDN’’ ou encore l’affaire de recrutement clandestin à la Fonction Publique d’une trentaine agents pour le compte du  Ministère de l’Enseignement Secondaire.  Ou plus récemment, l’affaire de dilapidation des fonds des services de transport de la présidence de la république dans laquelle des cadres des finances et du trésor sont en détention. Y figurait aussi  ‘’l’uraniungate’’ autour d’un montant de 200 milliards de FCFA.

L’affaire MEBA ou du Ministère de l’éducation de base et de l’alphabétisation, rappelle-t-on, avait été révélée en 2006 par l’hebdomadaire Le Républicain, portait sur le détournement des fonds de l’éducation destinés aux manuels scolaires pour un montant d’environ quatre (4) milliards de francs CFA.

Deux ministres de l’éducation de l’époque des faits avaient été mis en accusation par l’Assemblée Nationale et écroués.

Au cours du même régime, en 2007,  l’affaire  des ‘’fonds d’aide à la presse’’ pour 100 millions de FCFA avait conduit au vote d’une  motion de censure contre le premier ministre de l’époque, sa mise en accusation et son incarcération.

Quant à  l’affaire dite ‘’des bébés importés’’ qui avaient fait les choux gras du journal ‘’L’Evénement’’, elle s’était soldée par une série de procès journal et l’incarcération de  plusieurs personnalités politiques en vue.

Les medias n’étaient pas en reste sur l’affaire du Ministère de la Défense nationale (MDN)  portant sur  des détournements de fonds publics, de surfacturation et de fausses factures révélée par un audit conduit par l’inspection Générale des Armées et de la Gendarmerie sur instruction du Président de la République en date du 23 septembre 2019.

Un premier rapport avait fait état  de 48 milliards  FCFA de surfacturation et 28 milliards  FCFA de matériel non encore livré  alors que le délai contractuel était épuisé.

Par la suite,  le rapport final de la cour de comptes avait retenu  une surfacturation pour 12,1 milliards de FCFA.

Au cours  d’un point de presse, le mardi 4 janvier 2021, le directeur général de l’Agence Judiciaire de l’Etat (AJE), M. Omar Ibrahim, avait indiqué que l’Etat du Niger est mis dans ses droits dans le cadre de cette affaire de détournement d’équipements militaires.

L’affaire MDN avait trouvé une issue politique. « C’était un arrangement entre acteurs politiques »,  dénonce Elhadj Souleymane du journal Niger Inter.

Ce journaliste est aussi l’auteur d’un article, paru le 30 Novembre 2019, dénonçant un recrutement clandestin à la fonction publique pour le compte de l’enseignement secondaire.

Après une inspection de la HALCIA et l’effet  de cet article, le recrutement en question avait été annulé le 2 décembre 2019.

Il faut toutefois se rendre à l’évidence que nombre de travail d’investigation ou d’alerte des medias n’a pas trouvé une oreille attentive des autres acteurs à savoir  la justice ou les pouvoirs publics. Il arrive même que dans certaines circonstances le chasseur devient la proie avec des plaintes ou autres menaces.

Des observateurs notent que certains journalistes, faute de formation ou mus par des gains faciles versent plus dans le sensationnel ou les effets annonce que la recherche des preuves qui est le fondement du journalisme d’investigation.

Les médias nigériens face à des obstacles

L’investigation est le genre journalistique par excellence de lutte contre la corruption. Les journalistes investigateurs au Niger font face à de nombreux obstacles dans le cadre de leur travail, ont remarqué plusieurs spécialistes contactés par l’ANP.

Elhadj Souleymane cite au nombre de ces obstacles  « l’accès difficile aux informations et aux documents administratifs, surtout sur les questions sensibles ; le manque ou l’insuffisance des moyens financiers et logistiques du journaliste pour mener des investigations ;  l’ingérence des leaders et partis politiques dans les affaires judiciaires quand des proches sont mis en cause, avec notamment des arrangements politiques ».

Pour sa part, Maman Wada de l’ANLC/TI dénonce le fait que  « la protection des dénonciateurs n’est pas prise en compte dans la lutte contre la corruption au Niger exceptée la dénonciation du financement du terrorisme ».

Certains professionnels de media pointent en plus  le risque d’instrumentalisation des journalistes dans le cadre de règlement de compte  politique quand par exemple des sources qui ont tel ou tel intérêt font ‘’fuiter’’ ou fournir de ‘’tuyaux’’ aux journalistes.

Il y a aussi d’autres types de menaces.  Reporters Sans Frontière pointe du doigt «les poursuites et condamnations incessantes visant le directeur de publication de L’Événement, Moussa Aksar, auteur de plusieurs enquêtes sur la corruption et les malversations financières impliquant de hauts responsables politiques et militaires,  ce qui témoigne des menaces qui pèsent sur le journalisme d’investigation ».

Défis multiformes

Pour améliorer les conditions de travail des journalistes dénonciateurs de corruption au Niger,  Sahirou Youssoufou, secrétaire général de la Maison de la presse, cadre fédérateur des organisations socio-professionnelles des médias au Niger préconise une série de mesures.

Et le responsable associatif de citer  entre autres, la formation axée sur la spécialisation en journalisme d’investigation, l’accessibilité aux  informations officielles, la création par la HALCIA d’un réseau des journalistes spécialistes en la matière, la  création d’un cadre juridique protégeant les journalistes d’investigation et la mise à la disposition des journalistes d’investigation d’un fonds financier pour les enquêtes.

Combat des médias contre la corruption : une obligation constitutionnelle

La lutte contre la corruption des médias, au-delà des considérations  déontologiques, trouve aussi un  fondement légal.

En effet, la Constitution du 25 novembre 2010, en son article  158 fait obligation aux médias de s’investir dans la lutte contre la corruption et toutes autres formes d’abus de pouvoir et de mauvaise gouvernance.

Cette disposition de la loi précise que  « les médias ont l’obligation de favoriser le débat démocratique et de promouvoir les droits humains fondamentaux, les langues et les produits sportifs et culturels nationaux, l’unité nationale, la tolérance et la solidarité, la paix et la sécurité, entre les différentes communautés, ainsi que la lutte contre toutes formes de discrimination (…) ».

Selon Abdou Maman Jaharou, Président de l’observatoire nigérien des médias pour l’éthique et la déontologie (ONIMED), cette disposition Constitutionnelle suppose, « que les médias posent le débat sur l’actualité de la gouvernance, en rappelant aux dirigeants, aux décideurs, la responsabilité qui leur incombe de faire appliquer les lois régissant la gestion des deniers publics, la transparence dans la passation des marchés publics, les investissements dans les secteurs sociaux, en fonction des besoins des populations ».

A cet égard,  « les journalistes et les médias doivent refuser d’être corrompus et de s’en tenir uniquement aux faits qu’ils rapportent et aux preuves irréfutables qu’ils détiennent »,  fait valoir Ibrahim Moussa, Rédacteur en Chef du Journal La Roue de l’Histoire.

Le Niger qui compte en 2022, 67 radios privées, 15 chaînes de télévision privées et 16 sites de presse en ligne occupe le 59ème rang  sur un total de 180 pays étudiés, selon le classement mondial de la liberté de presse de Reporters Sans Frontière.

Le pays dispose d’un arsenal répressif contre la corruption et des institutions de lutte contre la corruption et d’inspection et de contrôle. Il s’agit de la HALCIA, de la Ligne verte, de la Cellule nationale de Traitement de l’Information Financière, CENTIF, de l’AJE,  de la cour des Comptes et des inspections de Finances.

Mahamane Sabo Bachir

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