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Côte d’Ivoire – AIP/ Peguékaha, le village de Fologo, au lendemain de l’annonce de son décès (REPORTAGE)


  7 Février      157        Divers (1624),

 

Korhogo, 07 fév 2021 (AIP) – Peguékaha s’est réveillé ce samedi 6 février 2021 avec la nouvelle de la disparition de son illustre fils. De bouche à oreille, la triste information a rapidement circulé dans le village. Ce matin, le froid matinal de la journée d’harmattan qui commence est plus glacial que d’habitude.

« Je l’ai entendu à la radio hier soir (vendredi, ndlr). Et beaucoup de gens en parlent ce matin. Mais aucun membre de la famille ne m’a encore informé directement », a réagi le chef principal du village, Soro Amadou, comme s’il espérait un improbable démenti.

Pour le moment, les habitants du village vaquent, en apparence, à leurs occupations quotidiennes. Mais tous savent que ce samedi n’est pas un jour ordinaire à Péguékaha. D’ailleurs, le calme et l’atmosphère particulièrement lourde sont révélateurs. « En pareil circonstance, le chef réunit le village pour annoncer le décès. C’est ce que tout le monde attend pour commencer à porter le deuil », explique Arouna Donassigué, un jeune du village.

L’adieu au chef…

Il y a quelques semaines, Laurent Dona Fologo avait appelé le chef pour prendre de ses nouvelles ainsi que de celles du village. Il avait alors informé ce dernier qu’il ne se sentait pas très bien, mais l’avait rassuré en ajoutant que ça n’avait rien d’inquiétant.

Les jours suivants, le chef le rappela à son tour pour s’enquérir de l’évolution de son état de santé. Ce jour-là, la conversation prit une tournure à laquelle le chef n’avait pas accordé beaucoup d’importance, mais dont il mesure le sens depuis la nouvelle du décès.

« Je lui ai demandé s’il allait mieux. Il a répondu « pas tout à fait ». Puis, il m’a demandé ce que je pouvais faire pour lui. Sans trop y réfléchir, j’ai répondu « pas grand-chose ». Mais il a insisté en me demandant ce je comptais faire pour lui s’il mourrait. J’ai essayé de le dissuader de penser à la mort. Il m’a alors répondu ceci : « De Gaulle est mort, Houphouët Boigny est mort… Moi aussi je vais mourir un jour ».

Le jeudi 4 février, un des enfants de Fologo a rappelé le chef. La nouvelle n’était pas intéressante : l’état de santé de son papa s’était dégradé…

Laurent Dona Fologo, un baobab à Péguékaka qui se couche

En attendant l’annonce officielle du décès par le chef au village, chacun, à Péguékaha, vit sa douleur intérieurement. Laurent Dona Fologo était un père ou un grand-père pour tous. C’était le grand arbre qui couvrait la localité de son ombre paisible et reposante. « Le baobab s’est couché », soupire Soro Donatani, un vieil homme du village.

Si l’homme était reconnu au niveau national pour sa générosité, sa simplicité et son abord facile, il l’était davantage dans son propre village. Ici, il vivait dans la population sans barrière, en dépit du rang social élevé dont il jouissait. Il se confondait aux siens, les servait et leur rendait beaucoup de services.

A l’époque, tout-puissant collaborateur de Félix Houphouët Boigny, il a profité de ce privilège pour œuvrer au développement de sa localité d’origine, la marquant de façon indélébile de son empreinte. Sous son leadership, Péguékaha, petit village perdu à une dizaine de kilomètres de Sinématiali, est sorti de l’ornière : le village a grossi par association avec d’autres villages, a bénéficié d’un château d’eau, a été connecté au réseau électrique national, etc. Il a aidé de nombreux jeunes en difficulté à poursuivre les études ou à trouver un emploi. Mais surtout, il a offert gracieusement des maisons modernes aux villageois. Des maisons qu’ils habitent fièrement aujourd’hui. Cet acte particulièrement, personne à Péguékaha n’est prêt de l’oublier.

« Fologo est plus qu’un père pour nous tous ici. Personne ne peut pas se souvenir de tout ce qu’il a réalisé pour notre village, pour les villages voisins et pour chacun de nous individuellement », avance Silué Nangourou, le chef de l’un des sept villages associés qui forment Péguékaha aujourd’hui.

Bien que retiré du devant de la scène politique depuis une dizaine d’années, celui qui se disait apôtre de Félix Houphouët Boigny et de sa philosophie de paix n’avait rien perdu de son aura à Péguékaha et ses alentours. Il était demeuré le rassembleur d’hommes, le guide, l’éclaireur du village, la source à laquelle tout le monde s’abreuvait. Plus que tout autre personne, on le consultait dans les situations qui engageait l’intérêt du village et ses avis étaient pris en considération.

« C’est lui que nous connaissons ici. Aujourd’hui, nous nous sentons orphelins. Je ne sais pas si quelqu’un d’autre pourra faire autant qu’il a fait pour nous », regrette le chef principal, Soro Amadou.

Le domicile familial… vide de monde

Le domicile villageois du défunt est encore vide de monde en ce lendemain matin de l’annonce du décès. Dans la cour, cinq ou six enfants âgés d’environ quatre à 10 ans s’amusent, inconscients du drame qui se déroule.

A l’intérieur d’une des maisons, dame Yéo Noubon pleurait silencieusement. Un vieil d’environ 70 ans se tenait à ses côtés. Il lui parlait de temps en temps dans la langue locale. « Je suis venu la consoler », explique-t-il.

Âgée d’environ 45 ans, Yéo Noubon est la nièce du défunt. C’est elle qui habite la maison de Fologo au village. Ce matin, le chef est venu lui annoncer la triste nouvelle. « Tout s’est écroulé autour de moi », parvient-elle à dire, en essuyant négligemment des larmes qui coulèrent de plus bel sur ses joues.

Son visage était tendu. Les yeux rougis. Elle a vu son oncle pour la dernière fois le 31 octobre 2020. Il était revenu à Péguékaha à l’occasion de la campagne présidentielle, faisant la navette entre le village et Sinématiali comme à ses habitudes. Le 31 octobre, il a voté à Sinématiali et est reparti à Abidjan le même jour, après un détour au village. « Il était très bien portant », souligne-t-elle, résignée.

Trois mois après, Laurent Dona Fologo va certainement faire l’ultime voyage à Péguékaha, la terre de ses ancêtres qu’il a tant aimée. Mais cette fois-ci, dans un corps sans vie.

L’ex tout-puissant secrétaire général du PDCI-RDA, proche collaborateur d’Houphouët Boigny et ancien président du Conseil économique et social s’est éteint le vendredi 5 février, à 81 ans. Une bibliothèque de la vie politique ivoirienne qui brûle, puisqu’il part sans laisser d’écrits. Comme somme maître, le père de la Côte d’Ivoire moderne, Houphouët Boigny.

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