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Gonnanrou : Origine et sens en milieu Baatonoum


  6 Juillet      223        Arts & Cultures (3047),

 

Porto-Novo, 6 juil. (ABP) – Gonnanrou communément appelé plaisanterie à parenté en milieu Baatonoum au nord du Bénin et  au nord  du Nigeria, est une pratique ancestrale qui consiste à instaurer une taquinerie par rigolade  entre cousins, grands-parents ou entre les Baatombou et d’autres ethnies, sans pour autant s’offusquer. Cette pratique fait partie intégrante des meilleures règles traditionnelles instaurées pour mettre en valeur et sauvegarder le savoir-vivre entre communautés chez les #baatombou. D’où provient cette plaisanterie et quel est donc son sens en milieu Baatoumbou ?

Par Boni N’yô SINASSON

 

Gonnanrou : un terme qui conserve tout  son sens en milieu Baatonoum

Selon le journaliste culturel, Soulémane Gbassidé, Rédacteur en chef de la Radio Deeman Fm de Parakou, une ville située au nord Bénin, la plaisanterie à parenté communément appelée « Gonnanrou »  est un fait social qui est aujourd’hui une identité culturelle en milieu #Baatonoum. En fait, explique-t-il,  certains peuvent parler « de cousinage ». A en croire le journaliste culturel, le terme « Gonnanrou » existait  depuis la nuit des temps et est pratiqué entre les cousins dans cette communauté. « Ça peut être entre un cousin et une cousine et vice-versa ou entre cousines », va-t-il ajouter. En clair, explique M. Soulémane Gbassidé, on peut dire que cela se passe entre « enfant d’homme » et « enfant de femme ». Aux dires de cette personne ressource, ça voudrait dire que le fils d’un tel homme a forcément son cousin ou sa cousine au niveau de la mère d’un tel fils, etc.

La plaisanterie à parenté « Gonnanrou » est également pratiquée entre grand père et petit-fils ; parce que c’est  aussi une affaire de génération. En milieu Baatonoum, le grand-père et le petit-fils sont de la même génération, d’où cette plaisanterie à ce niveau. Mais entre les cousins, c’est plus pratique et perceptible chaque jour que Dieu fait, on la vit, a-t-on remarqué. Pour les observateurs non-avertis, fait savoir l’orateur, pendant les cérémonies ou la fête identitaire des Baatombou appelée « Donkonrou », c’est-à-dire le jet de feu, c’est en ce moment que Gonnanrou est plus activé et observé par tout autre observateur. « Gonnanrou » est aussi pratiqué entre époux (entre un homme et sa femme), a expliqué le journaliste, précisant qu’il y a cette plaisanterie qui se fait soit au lit ou quand ils sont en couple à deux (en tête à tête). « C’est quand-même des mots d’amour ou de petites taquineries pour renforcer l’amour, etc. », a-t-il fait comprendre tout en souriant.

 

Gonnanrou, au-delà d’un simple amusement  est un   moyen d’éduquer en milieu baatonoum

Sur le plan culturel, informe Soulémane Gbassidé, Rédacteur en chef de la radio Deeman Fm,  « Gonnanrou » consolide les relations familiales et amène l’enfant à aller à l’apprentissage de la vie future, à mieux comprendre et connaitre la famille. Cette plaisanterie, soutient-il, permet également aux enfants d’aller en apprentissage du respect mutuel et de la hiérarchie. A l’en croire, entre cousins ou cousines, le premier ou la première peut être plus âgé (e) et être jeune frère ou jeune sœur dans le cousinage. Le deuxième ou la deuxième cousine avec qui le premier ou la première, forme le couple de cousinage peut être un bébé moins âgé ; mais ce n’est ni l’âge, ni l’expérience qui compte en ce moment ; mais plutôt la filiation, a-t-il insisté.

Selon Soulémane Gbassidé, c’est cela qui permet de mieux connaitre la famille et savoir qui est supérieur à l’autre, qui doit faire allégeance à l’autre, qui doit respecter l’autre ou bien quand est-ce qu’on doit prouver ce respect-là.

 

La plaisanterie à parenté « Gonnanrou »  en milieu baatonum, un moyen pour se dire la vérité sans pourtant blesser son  interlocuteur!

Les cousins se taquinent et jusqu’à un âge adulte et à un moment donné, c’est dans cette taquinerie, qu’ils se disent des vérités, a martelé le journaliste culturel. C’est pourquoi, très souvent en milieu Baatonoum, va-t-il souligner, quand par exemple, il y a un chef ou un roi qui a tendance à gérer de façon autocratique ou peut-être commet des errements, on fait appel à son cousin. C’est ce dernier qui peut lui dire la vérité en face en plaisantant avec des expressions et des comportements pour lui faire savoir ce que les gens pensent et disent de lui. Parce que le chef étant fort, tout le monde ne peut pas lui parler en face et seul son cousin pourra le faire mieux que le griot, en le ramenant à l’ordre, a expliqué M. Gbassidé.

 

« Gonnanrou », un fait social qui  rapproche les baatombu aux autres communautés

La plaisanterie se pratique par ailleurs entre la communauté baatonoum et d’autres communautés telles que les Nagots ou Yoruba, et même perceptible par tous. Pour Soulémane Gbassidé, lorsqu’un Baatonu et un Nagot se rencontrent, les premières expressions c’est « Gonnanrou ». Ils peuvent ne pas se connaitre nulle part ; mais ils commencent par cette plaisanterie, ce qui leur permet de vite se  connaitre et se rapprocher davantage, a-t-on fait savoir. « Que ça soit en milieu baatonoum ou en milieu nagot ou ailleurs, quand ils se rencontrent en quelque sorte, c’est le sang qui parle et les rapproche davantage laissant place ainsi à une ambiance de retrouvaille et de taquinerie entre eux », a laissé entendre la personne ressource. Selon ses analyses, « Gonnanrou » permet d’éviter les querelles intestines ; car les cousins se retrouvent pour fumer le calumet de paix. A l’interne, en milieu baatonoum, d’une région à une autre, il existe également une plaisanterie à parenté ; mais pas entre famille mais plutôt entre communauté, a-t-on aussi appris.

 

« Gonnanrou »: au-delà de simples  paroles !

En plus des mots, expressions et taquineries qu’on peut remarquer entre ces deux communautés (Baatonoum et nagot), il y a également l’aspect matériel qu’on voit. Quand un Baatonu quitte par exemple sa localité pour aller à une cérémonie ou funérailles en milieu nagot, il a droit, dans le cadre de cette plaisanterie de prélever des produits ou du bétail en guise du symbolisme tout en respectant des principes ou rituels. En en croire le journaliste culturel, l’organisateur en chef de la cérémonie est informé d’avance de l’arrivée des voisins et parents qui vont pratiquer cette plaisanterie tout en se présentant comme tel.

 

« Gonnanrou » : une obligation  morale et culturelle qui lie les Baatombou aux nagots

Au-delà d’une simple taquinerie, Gonnanrou se veut aussi  une obligation morale et culturelle liant les communautés en milieu Baatonum et alliés, a-t-on constaté. « Quand ils ne le font pas même, ce sont les organisateurs de ladite cérémonie qui en réclament, parce que c’est avant tout culturel et avantageux pour la cohésion de la communauté », a fait remarquer M. Gbassidé. De même, lorsque les nagots quittent leurs régions et se rendent en milieu baatonoum, ils le font également, en guise de symbolisme et non parce qu’ils sont des voleurs, escrocs ou affamés, a-t-il clarifié.

L’observateur ou le Baatonou qui est là se rend compte toute suite de la présence de cousins et par des mots de passe, la plaisanterie commence entre eux.

 

Gonnanrou, une stratégie de rapprochement en  communauté  baatonoum

En dehors des Nagots, les Baatombou et les Peulhs se taquinent également ; mais cela n’est pas aussi fort et amplifié comme au niveau des nagots, a précisé communicateur Gbassidé.

Le peulh étant un nomade est respecté ; car en son temps, le baatonoum ne maîtrisait pas son origine et du fait qu’aux yeux du Baatonou cette ethnie est un peu particulière de par son teint, a-t-on évoqué. Mieux, le peulh étant le gardien du cheptel, ajoute Soulémane Gbassidé, le butin du Baatonum lui est souvent envoyé pour le gardiennage et l’élevage.

Au-delà, d’autres descendants Baatombou sont envoyés chez les peulhs pour telle ou telle autre raison ; ce qui a même crée une certaine sous communauté intégrée aujourd’hui dans la communauté baatonoum. Raison pour laquelle cette plaisanterie existe aussi entre les Baatomboum et les Peulhs. « Gonnannrou » entre ces deux ethnies a été beaucoup plus activée par une caste spéciale des Baatoumbou appelée les Bouchers (Yararibou en langue baatonoum), a expliqué M. Gbassidé.

Les Baatombou et l’ethnie Djerma de descendance Songhaï ou Sonraï, pratiquent également « Gonnanrou » qui serait né après des guerres d’invasions et des razzias où ces deux communautés s’étaient, selon l’histoire, affrontées, provoquant ainsi des transhumances. Ces Songhaï étant des caravaniers ont, de ce fait, migré vers le territoire baatonoum ; ce qui créa certainement un lien de parenté.

« Mais très souvent le Baatonoum plaisante avec un peuple qu’il domine ou qu’il a tendance à dominer », a conclu le journaliste culturel Soulémane Gbassidé.

NB :

Baatonoum : la langue parlée ;

Baatonou ou Baatonu (Péjoratif de Bariba) : l’individu

Baatombou ou Baatombu : plusieurs individus.

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