Korhogo, 9 juillet 2023 (AIP) – Dans une interview avec le correspondant de l’Agence Ivoirienne de Presse (AIP) à Korhogo, le député maire de M’Bengué, Ali Kader Coulibaly, fait le point sur les progrès réalisés en matière de droits des femmes. Engagé à améliorer la situation des femmes, il a mis en place une cellule des filles conscientes à M’Bengué. Après un an de sensibilisation, il souligne les avancées enregistrées dans cet entretien.
AIP : En tant que député maire de M’Bengué, pourquoi avez-vous choisi de vous investir autant dans la question des jeunes filles, au point de vous identifier comme le père des filles de M’Bengué ?
Dans le cadre de la politique d’équité et de revalorisation du genre prônée par le gouvernement, le département de M’Bengué ne peut pas rester à l’écart. Il est indéniable que le taux de scolarisation des jeunes filles dans le nord du pays en général, et dans le département de M’Bengué en particulier, est relativement faible par rapport à celui des garçons. Il est de notre devoir, voire d’une obligation, d’inverser cette tendance.
En 2022, vous avez créé la cellule des filles conscientes. Pourquoi une telle initiative ?
Conscients des défis auxquels sont confrontées nos filles, sœurs et parents, tels que les grossesses précoces, l’abandon et les mariages précoces, la mise en place d’une telle structure vise à les aider à prendre conscience de l’importance d’un avenir meilleur. En tant que père et député maire, il était de mon devoir d’initier une dynamique pour faire de nos filles et petites-filles les futures femmes influentes de l’administration ivoirienne. Notre vision est donc de combattre cette discrimination en sensibilisant tous les acteurs du système éducatif du département pour leur bien-être.
Depuis la création de la cellule des filles conscientes, quel bilan tirez-vous aujourd’hui de cette initiative ?
Le droit à une éducation inclusive et le maintien des filles à l’école sont des priorités. En ce qui concerne le bilan, il faut tenir compte du contexte social. Nous apportons un soutien nutritionnel aux enfants par le biais de la construction de cantines scolaires. Cette année, les résultats du Certificat d’Études Primaires Élémentaires (CEPE) ont montré un taux de réussite de 66% pour les écoles disposant de cantines scolaires, contre 53% pour celles qui n’en ont pas. Cette initiative s’inscrit dans une continuité de sensibilisation avec la mise en place de la cellule dans le département. Nous avons constaté une réelle prise de conscience chez les jeunes filles, ainsi que chez leurs parents. Cela a permis de réduire de manière significative les taux de grossesses précoces et d’abandon chez les jeunes filles au sein de nos établissements secondaires.
Hier, vous avez lancé un ultimatum pour retrouver la mineure Dao, admise au BEPC mais qui n’a pas pu retirer son attestation car elle a été mariée de force. Quelles mesures comptez-vous prendre dans cette affaire ?
En tant que premier magistrat de la Commune de M’Bengué, il est de mon devoir de résoudre rapidement et de manière appropriée cette affaire. Ainsi, en collaboration avec les autorités administratives et sécuritaires, avec le soutien de nos chefs traditionnels et grâce à la coopération de la population, nous espérons le retour de cette jeune fille dans les meilleurs délais. Elle a été admise au BEPC et a le droit de poursuivre sa scolarité et de vivre comme une fille de son âge. Depuis que nous avons été informés de cette situation, nous travaillons activement pour résoudre cette affaire.
Quelle est la situation des femmes en général à M’Bengué, et plus particulièrement celle des jeunes filles ?
La situation des femmes à M’Bengué en termes de droits (équité et genre) n’est pas très encourageante en raison de l’analphabétisme et de l’attachement à nos valeurs traditionnelles. Cependant, depuis que nous sommes à la tête du département et de la commune, nous menons des actions pour lutter contre cette réalité. Parmi les actions que nous entreprenons, il y a la création de la cellule des filles conscientes.
Avez-vous un appel à lancer à la population de M’Bengué pour la préservation des droits des jeunes filles ?
J’aimerais lancer un appel à nos populations afin qu’elles prennent au sérieux les questions relatives aux droits des jeunes filles dans notre département. En cette année 2023, déclarée année de la jeunesse par le gouvernement, nous devons accorder une attention particulière à la situation des jeunes filles en défendant leurs droits et leur intégrité physique et morale. C’est également l’occasion d’appeler les parents d’élèves à encourager l’ouverture d’esprit de nos filles, afin qu’elles puissent envisager un avenir prometteur.
Propos recueillis par Soro Sionfolo, chef du bureau régional de l’Agence Ivoirienne de Presse à Korhogo.