Abidjan, 18 oct 2024 (AIP)- Le Centre d’Excellence Régional contre la Faim et la Malnutrition (CERFAM), a à l’occasion de la journée mondiale de l’alimentation célébrée le 16 octobre de chaque année, ouvert une lucarne sur le relèvement des défis du système alimentaire en Afrique, notamment le pouvoir de la coopération Sud-Sud et triangulaire pour garantir le droit à l’alimentation.
L’alimentation est le pilier fondamental de la vie. Elle est une source de subsistance et de bien-être, fournissant les nutriments et l’énergie essentiels dont les individus ont besoin pour se développer, prospérer et atteindre leur potentiel. Reconnaissant son importance vitale, la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 a affirmé le droit à l’alimentation comme un élément essentiel du droit à un niveau de vie adéquat. L’alimentation est plus qu’un besoin de base, c’est un droit humain inaliénable qui devrait être accessible à tous, quelles que soient les circonstances.
La Journée mondiale de l’alimentation, instituée par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) en 1979, est une journée pour sensibiliser à la faim et à la malnutrition dans le monde. Le thème de cette année, Le droit aux aliments pour une vie et un avenir meilleur, met en avant l’importance de garantir un accès équitable à la nourriture, en tant que pierre angulaire de la dignité humaine et du développement.
Il s’aligne sur l’Agenda 2063 de l’Union africaine, qui ambitionne un continent prospère et sécurisé sur le plan alimentaire. La Résolution sur le droit à l’alimentation et la résilience en nutrition en Afrique, adoptée par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, souligne également la nécessité d’intégrer la nutrition dans les politiques nationales pour garantir le droit à l’alimentation pour tous les Africains, en particulier dans les régions vulnérables.
MALNUTRITION ET FAIM EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE
Aujourd’hui, 2,8 milliards de personnes dans le monde ne peuvent pas se permettre une alimentation saine, ce qui a entraîné une augmentation constante de toutes les formes de malnutrition, y compris les carences en micronutriments, la sous-nutrition et l’obésité. Malgré les progrès mondiaux, la malnutrition reste un problème omniprésent, et l’Afrique subsaharienne fait face à des défis importants. En 2022, environ 269 millions de personnes dans la région étaient sous-alimentées, avec environ 20 pour cent de la population souffrant de la faim. Le retard de croissance affectait 23,8 pour cent des enfants de moins de cinq ans en Afrique subsaharienne, soit environ 55,6 millions d’enfants, un taux bien plus élevé que les moyennes mondiales.
Les causes de la faim et de la malnutrition en Afrique sont complexes et multifactorielles. Le changement climatique a gravement affecté la productivité agricole, entraînant des sécheresses plus fréquentes et plus intenses, des inondations et d’autres phénomènes météorologiques extrêmes qui perturbent la production alimentaire et les chaînes d’approvisionnement. Les conflits et l’instabilité politique dans de nombreux pays exacerbent l’insécurité alimentaire, en déplaçant des populations et en interrompant l’agriculture et le commerce. De plus, les chocs économiques, comme les fluctuations des prix alimentaires mondiaux, les effets de la pandémie de COVID-19 et l’inflation, continuent d’affaiblir le pouvoir d’achat des populations vulnérables, limitant encore leur accès à une alimentation adéquate et nutritive.
Des agricultrices travaillant dans un champ à Kantara, dans le nord de la Côte d’Ivoire
Au-delà de ces crises, les défis structurels des systèmes alimentaires africains contribuent à l’insécurité alimentaire persistante. Alors que les petits exploitants agricoles produisent plus de 70 pour cent des denrées alimentaires du continent, ils n’ont souvent pas accès à des ressources essentielles telles que des semences de haute qualité, des équipements agricoles modernes et des infrastructures adéquates pour stocker et transporter leurs récoltes. Cela affecte non seulement la productivité agricole, mais entraîne également des pertes post-récolte considérables. En outre, les systèmes alimentaires africains sont souvent fragmentés et n’intègrent pas la chaîne de valeur nécessaire pour rendre les aliments nutritifs disponibles et abordables pour tous. Pour résoudre ces problèmes systémiques, il faut adopter une approche globale qui renforce chaque composante du système alimentaire – de la production et de la transformation à la distribution et à la consommation – tout en garantissant un accès équitable aux ressources et aux opportunités
LE RÔLE DE LA COOPÉRATION SUD-SUD ET TRIANGULAIRE DANS LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
La coopération Sud-Sud et Triangulaire (CSST) offre une plateforme innovante et collaborative pour permettre aux pays africains de relever les défis liés à la sécurité alimentaire et de promouvoir le droit à l’alimentation. La CSST facilite l’échange de connaissances, le transfert de technologies et le renforcement des capacités entre les pays du Sud, leur permettant de partager des solutions adaptées aux contextes locaux. Cette coopération est cruciale pour relever les défis uniques de la production alimentaire, de la durabilité agricole et de l’accès à une alimentation nutritive sur tout le continent.
Le CERFAM est à l’avant-garde de la promotion de la CSST pour améliorer la sécurité alimentaire en Afrique. En favorisant des partenariats entre les pays, le CERFAM facilite l’échange de bonnes pratiques et de modèles réussis pour améliorer les systèmes alimentaires. Par exemple, l’expertise chinoise en matière de production rizicole s’est révélée inestimable en Afrique de l’Ouest.
Grâce à des partenariats entre le CERFAM, le Centre d’excellence pour la transformation rurale du PAM en Chine et les gouvernements de Côte d’Ivoire et de Guinée, des initiatives de partage des connaissances ont permis d’améliorer les chaînes de valeur du riz, de la production à la gestion post-récolte. Ces initiatives permettent non seulement d’améliorer la productivité agricole, mais aussi de réduire les pertes post-récolte, d’accroître la disponibilité alimentaire et d’améliorer les moyens de subsistance des petits exploitants agricoles.
Des agriculteurs de Guinée et de Côte d’Ivoire participant à une formation organisée par des experts chinois pour apprendre les techniques de production du riz, à Guiguidou, en Côte d’Ivoire
De même, le développement de programmes d’alimentation scolaire basée sur la production locale (HGSF) en Afrique, soutenu par le Brésil, montre comment la CSST peut promouvoir la sécurité alimentaire et la nutrition. Les programmes HGSF, qui fournissent localement des aliments pour les repas scolaires, relient directement les petits exploitants agricoles à des marchés sûrs tout en garantissant que les enfants reçoivent des repas nutritifs. Cette approche intégrée aborde de multiples dimensions de la sécurité alimentaire, notamment la productivité agricole, l’accès au marché et la nutrition, démontrant ainsi la capacité de la CSST à favoriser des solutions durables.
Atteindre la sécurité alimentaire et réaliser le droit à l’alimentation en Afrique nécessite une approche globale qui s’attaque aux nombreux défis auxquels sont confrontés les systèmes alimentaires du continent. Grâce à la coopération Sud-Sud et Triangulaire, les pays africains peuvent collaborer pour surmonter ces défis en partageant des connaissances, des technologies et des solutions innovantes adaptées aux contextes locaux.
APPEL À L’ACTION
Pour réaliser cette vision, il est impératif que les pays africains et leurs partenaires mondiaux continuent d’approfondir leur collaboration par le biais du CSST. En partageant les solutions et les ressources, nous pouvons construire des systèmes alimentaires plus résilients, plus inclusifs et plus durables, en veillant à ce que le droit à l’alimentation devienne une réalité pour chaque Africain, aujourd’hui et pour les générations à venir