Abidjan, 08 nov 2023 (AIP) – Bagoléioua, localité cosmopolite présentant une allure moderne avec des maisons en terre battue, est un village de la sous-préfecture de Grand-Zattry, dans le département de Soubré. Cette bourgade qui bénéficie de l’approche WIND mise en œuvre dans le cadre du projet ACCEL Africa par le Bureau de l’Organisation internationale du travail (OIT) à Abidjan, s’est engagée résolument dans la lutte contre le travail des enfants, à travers de nombreux progrès enregistrés dans ses plantations de cacao.
Lors d’une visite dans le village, deux pairs formateurs WIND, Yabao Oumarou et Ouédraogo Souleymane, accueillent la délégation dans une cour bien entretenue, dotée d’un puits équipé d’une pompe et d’un réservoir d’eau assimilable à un château d’eau et qui ne laisse aucun visiteur indifférent.
Une fois à l’intérieur de l’habitation des hôtes, c’est une pièce impeccablement organisée, avec des étagères soigneusement rangées qui sont découvertes. Parmi les objets rangés, des documents et une boîte à pharmacie pour les premiers soins en cas de maladie d’un membre de la famille.
Oumarou, très heureux, explique que l’approche WIND a grandement amélioré leurs conditions de vie et de travail. Grâce à l’accès à l’eau, il peut arroser ses pépinières et pratiquer la pisciculture pour fournir du poisson frais à sa famille directement à domicile. De plus, leurs outils de travail sont bien organisés, ce qui facilite leur accès et prévient les blessures.
L’approche “Work Improvement in Neighbourhood Development” (WIND), initiée par l’OIT, a apporté de nombreuses améliorations. Elle fait partie de la première phase du projet ACCEL Africa dont l’objectif est d’améliorer et d’appliquer des cadres politiques, juridiques et réglementaires pour éliminer le travail des enfants et trouver des solutions innovantes contre ce phénomène dans les chaînes d’approvisionnement des cultures de rente.
L’approche WIND est une initiative de formation participative qui permet aux communautés rurales d’adopter des solutions simples et économiques pour améliorer leurs conditions de travail et de vie dans la culture du cacao. Elle se base sur les principes de santé et de sécurité au travail (SST).
L’approche propose aux producteurs des solutions pratiques pour le stockage des produits, la manutention du matériel et le transport du produit. Elle permet d’éviter les risques d’invalidité à moyen et long terme dans les travaux champêtres, renforçant ainsi la résilience des producteurs.
Création d’un mini château d’eau
Yabao Oumarou, un pair formateur, a partagé son expérience avec le projet Wind initié par ACCEL Africa. Avant l’intervention du projet, son puits n’était pas sécurisé, posant des risques pour les enfants et la qualité de l’eau.
Grâce au projet, il a pu sécuriser le puits avec une clôture, installer un moteur pour puiser de l’eau et ériger en hauteur un réservoir de stockage d’eau. Cette innovation lui permet d’avoir accès à une source d’eau propre pour sa famille, améliorant ainsi sa qualité de vie.
« C’est grâce au projet WIND initié par ACCEL Africa que j’ai réalisé ce forage. Auparavant, mon puits n’était pas sécurisé, les feuilles des arbres y tombaient, nos enfants n’étaient pas en sécurité, car ils pouvaient tomber dans le puits. Cependant, grâce à WIND, nous avons installé un moteur à l’intérieur du puits, couvert le puits et érigé une clôture tout autour de celui-ci pour empêcher les enfants d’y accéder », explique le planteur, ajoutant le projet lui procure un bien-être.
« Avec l’installation du forage, j’ai pu créer un jardin où j’arrose mes pépinières de cacao à tout moment. J’ai également accès à de l’eau potable pour ma consommation personnelle, ce qui me permet de me laver aisément. De plus, les femmes de la communauté n’ont plus besoin de puiser de l’eau au puits pour effectuer leur lessive. En somme, c’est une source de bien-être qui nous dispense de l’effort tout en nous épargnant des factures », affirme M. Oumarou.
Il prévoit également de se lancer dans l’aquaculture pour produire du poisson frais à domicile grâce à cette installation, dans le cadre de la diversification de ses sources de revenus. Le paysan dit avoir déjà entrepris l’élevage de moutons.
Cette initiative vise à améliorer ses ressources financières. Au lieu d’acheter un bélier pour la fête de la Tabaski, il a choisi de mettre en place son propre élevage.
« Ecabo » une solution simple et innovante pour le cabossage du cacao
Oumarou témoigne qu’avant, il utilisait une machette pour ouvrir les cabosses de cacao, ce qui pouvait parfois causer des blessures. Maintenant, il utilise un appareil, appelé “Ecabo”, qui permet d’ouvrir les cabosses et de recueillir les fèves de cacao sans risque de blessure.
Pour faciliter le transport des fèves de cacao, il a conçu des paniers solides, évitant ainsi de porter des charges lourdes comme les sacs de cacao. Il a également amélioré les chemins dans leurs plantations pour faciliter l’évacuation des produits.
Oumarou a pu aussi acheter un tricycle pour faciliter le transport des fèves de cacao au village pour le séchage. De plus, les producteurs ont organisé leurs outils de travail dans un magasin pour un accès facile. Par exemple, ils ont conçu un balai à manche pour éviter aux femmes de se pencher pour balayer.
Ils ont également amélioré le stockage des sacs de cacao en les plaçant sur des palettes pour éviter l’humidité.
Par ailleurs, des foyers améliorés ont été créés grâce au projet WIND chez un autre formateur pair, Souleymane Ouédraogo, pour favoriser la cuisson des repas des femmes.
Des foyers améliorés, autre acquis du projet WIND
Avant l’introduction du projet WIND, les femmes cuisinaient avec trois pierres et du bois, ce qui les exposait à la fumée et à la fatigue. Grâce à WIND, elles ont été encouragées à construire des foyers améliorés. Ces foyers ont une cheminée qui évacue la fumée, rendant la cuisine plus sûre pour les femmes, raconte M. Ouédraogo.
Maïga Kadidiatou, une ménagère de Bagoléioua, témoigne des bienfaits du projet WIND. Grâce au foyer amélioré, elle peut désormais cuisiner plus confortablement sans être gênée par la fumée qui provoque des problèmes oculaires. Aujourd’hui, grâce aux foyers améliorés, ces problèmes de santé ne sont plus une préoccupation.
De plus, des étagères ont été installées pour ranger les ustensiles de cuisine en hauteur, empêchant ainsi les enfants ou les animaux domestiques de les manipuler.
Impact de ces projets sur les enfants
Ouédraogo Souleymane témoigne de l’impact positif du projet ACCEL Africa sur leur vie et leur travail. Avant le projet, ils étaient contraints d’utiliser des enfants dans les plantations, surtout en cas de maladie. Avec l’introduction du projet WIND, ils ont cessé d’utiliser les enfants dans les plantations.
Oumarou renchérit en disant que grâce à l’amélioration de la santé et de la sécurité au travail, ils n’ont plus besoin d’envoyer leurs enfants au champ, car ils sont en bonne santé.
Ouédraogo Souleymane indiquant la cheminée du foyer amélioré
Le Coordinateur national principal du projet ACCEL Africa au Bureau Pays de l’OIT-Abidjan, Ephrem N’Dépo Akafou, explique que l’absence de mesures de santé et de sécurité au travail est une cause du travail des enfants. En effet, sans ces mesures, les enfants en âge de travailler peuvent se retrouver à effectuer des travaux dangereux.
“De plus, le manque de mesures de santé et de sécurité au travail expose les parents aux accidents de travail. En cas d’invalidité, ils peuvent être amenés à utiliser leurs enfants comme main-d’œuvre de substitution”, a-t-il soutenu.
Philomène Kouamé