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planetGOLD Côte d’Ivoire réinvente l’orpaillage artisanal face aux défis environnementaux et socio-économiques (Feature)


  6 Septembre      11        Economie (22325),

 

Abidjan, 06 sept 2024 (AIP) – En Côte d’Ivoire, l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (EMAPE) de l’or a fortement augmenté au cours des deux dernières décennies.

Cette activité s’étend désormais sur 24 des 31 régions du pays et emploie plus de 500 000 personnes, principalement du nord.

Cependant, cette croissance rapide pose des défis écologiques et sanitaires majeurs. Le projet planetGOLD, lancé en 2023, vise à réduire l’utilisation du mercure et à introduire des pratiques plus durables et responsables pour transformer l’orpaillage en Côte d’Ivoire.

Une ruée vers l’or à double tranchant

Depuis 20 ans, l’EMAPE en Côte d’Ivoire est devenue une source de revenu majeure pour des milliers de personnes. Avec plus de 500 000 travailleurs, dont près de 300 000 dans le nord du pays, l’orpaillage est souvent perçu comme une bouée de sauvetage. “Pendant les périodes de soudure, de nombreuses familles se ruent vers l’EMAPE pour la survie “, déclare le directeur exécutif du Centre africain pour la santé environnementale (CASE), Dominique Bally Kpokro.

Pourtant, la majorité de ces exploitations sont informelles, et en 2020, seulement 38 licences d’exploitation étaient en vigueur, tandis que des centaines de sites opèrent sans cadre légal.

“Plus de 85 % des travailleurs sur ces sites sont des jeunes, souvent originaires de pays voisins”, ajoute-t-il. L’exploitation minière non régulée pose des défis économiques, environnementaux et sanitaires considérables.

Un impact environnemental désastreux

Le principal danger de l’EMAPE en Côte d’Ivoire est l’utilisation massive de mercure. Environ 10 tonnes de mercure sont employées chaque année pour produire 7 tonnes d’or. Ce métal lourd pollue les sols et les cours d’eau, affectant gravement les écosystèmes et la santé des populations locales.

“Les techniques d’amalgame et de brûlage à l’air libre libèrent du mercure, qui se retrouve dans l’air, l’eau et la chaîne alimentaire”, avertit le sous-directeur Santé Environnement au ministère de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Couverture maladie universelle, Dr Claude François Koffi.

Les populations locales, qui dépendent des rivières contaminées, sont particulièrement exposées. L’inhalation et l’ingestion de mercure entraînent des troubles neurologiques graves et rendent les terres infertiles pendant des décennies. Le mercure contamine également les poissons, une source essentielle de protéines pour les populations locales, soutient-il.

Le projet planetGOLD : une réponse innovante

Ce projet dirigé par le CASE et l’ONG IMPACT, sous la supervision du ministère de l’Environnement, vise à réduire l’utilisation du mercure dans l’EMAPE d’une tonne et demie par site, soit une réduction totale de 4,5 tonnes d’ici 2028. Ce programme  couvre les régions du Bélier, de la Marahoué, du Poro, du Hambol et du Moronou, promeut des alternatives au mercure et accompagne la formalisation des exploitations minières.

“Il est possible de produire de l’or sans mercure tout en respectant l’environnement et en procurant de la richesse à la population “, souligne Dominique Kpokro. Les mineurs reçoivent des formations et un accès à des technologies plus propres, leur permettant d’extraire de l’or de manière plus responsable.

Une transformation en cours : l’exemple de Krigambo 1

Le site de Krigambo 1, situé à quelques kilomètres du village de Krigambo, dans la sous-préfecture de Pakouabo, illustre cette transition. Anciennement aux mains des orpailleurs clandestins, ce terrain de 25 hectares est désormais l’un des pôles du projet.

Il est 16 heures, jeudi 29 septembre 2024. Sous un temps clément, une vingtaine de travailleurs, comme Ahmed Cissé, 23 ans, s’affairent à extraire l’or des monticules de sable. “Nous travaillons de 7h à 18h, en descendant dans une fosse de plus de 5 mètres de profondeur”, raconte Ahmed. Chaque jour, lui et son

équipe parviennent à extraire entre 4 et 5 grammes d’or, qu’ils vendent à 40 000 F CFA le gramme. Malgré les conditions de travail difficiles, ce jeune homme considère cette activité comme une chance. “C’est la jungle ici. Si tu as peur, c’est la mort”. Sur les sites artisanaux, le creuset ne peut dépasser 15 kilomètres.

Pour de nombreux jeunes comme Tra Bi Oly, 20 ans, l’orpaillage représente une opportunité de se construire un avenir. “Avec l’argent gagné, j’ai pu ouvrir une boutique de vêtements. Tant qu’il y a de l’or, on est dedans “, affirme-t-il, déterminé à poursuivre cette activité qui lui offre une stabilité financière. Les gains générés par l’orpaillage permettent aussi de financer l’éducation des enfants, comme en témoigne Ousmane Nanléman, un jeune Burkinabé de 18 ans, qui travaille avec ses sœurs pendant les vacances scolaires.

Dans l’extraction artisanale de l’or, le sable contenant de l’or est transporté dans des sacs vers des fosses de lavage. Là, il est mélangé avec de l’eau et agité pour séparer les particules d’or des graviers et du sable, par gravitation. Grâce à leur densité élevée, les particules d’or se concentrent au fond du récipient, facilitant leur récupération.

À Krigambo 1, on trouve 26 trous et une multitude de bassins de lavage. L’or est extrait sans mercure. “Tout se fait à la sueur de notre front, uniquement avec de l’eau”, témoigne Zamblé Pascale, une travailleuse du site. Cette méthode plus respectueuse de l’environnement s’étend progressivement à d’autres sites à travers le pays.

Vers une exploitation minière responsable

Un exploitant minier de la Marahoué, Douin Kogni Richard affirme que “nous travaillons dans la légalité, sans machines ni mercure”. Bien que les orpailleurs clandestins continuent de poser des défis, les bénéficiaires du projet planetGOLD s’engagent à suivre des pratiques sûres. “Nous voulons prouver qu’il est possible d’exploiter l’or de manière responsable”, déclare Tizié Gaston Martinin, représentant de la communauté de Baziafla.

Le respect des règles sans mercure est une priorité absolue pour le projet planetGOLD, qui veille à ce que l’orpaillage profite à toute la communauté.

Une prise en compte des défis liés au changement climatique pour un avenir durable pour l’orpaillage

L’exploitation minière artisanale contribue à la dégradation de l’environnement et modifie le climat local. “Il est plus juste de parler de variabilité climatique plutôt que de changement climatique. Parler de changement climatique revient à évoquer des variations sur plus de 30 à 50 ans. Or, l’EMAPE d’or telle que nous la connaissons date de 2002-2010 “, explique Dominique Bally Kpokro.

Selon lui, “ l’EMAPE influe sur le climat au travers de la coupe abusive d’arbres pour le soutènement des puits “, causant ainsi une déforestation massive. Cette pratique entraîne également “ une modification du microclimat dans les zones d’exploitation “, en causant une déforestation massive, modifie les microclimats des zones d’exploitation. Ces effets sont visibles dans plusieurs régions avec des “ sécheresses plus longues “ et des “ événements pluvieux extrêmes “, exacerbés par la dégradation des sols et l’ensablement des cours d’eau. Ils affectent aussi la production agricole et halieutique, essentielle à la sécurité alimentaire.

Pour contrer ces effets, planetGOLD prône le reboisement des sites miniers et l’aménagement des berges pour réduire l’ensablement des rivières et améliorer l’irrigation agricole. Il encourage également les artisans à adopter des pratiques respectueuses de l’environnement et à investir dans le développement local à travers des activités économiques liées à l’économie verte, telles que l’agroforesterie et l’éco-tourisme.

En restructurant l’exploitation minière artisanale, le programme ambitionne de réduire son impact écologique tout en améliorant les conditions de vie des communautés locales. Ce projet vise à transformer l’EMAPE en Côte d’Ivoire par la régularisation et la sécurisation de l’activité minière artisanale, conformément à l’objectif de l’État qui est de réduire de 60 % les émissions de mercure dans le secteur de l’orpaillage d’ici 2030 et à la convention de Minamata sur le mercure, ratifiée en 2013 par la Côte d’Ivoire.

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