Dakar, 04/11/2024 (MAP)- Depuis le 27 octobre, la campagne électorale pour les élections législatives anticipées du 17 novembre bat son plein au Sénégal. Un scrutin qui s’avère crucial et décisif pour le parti au pouvoir, « le Pastef les Patriotes » que dirige l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko en poste depuis le 5 avril.
Pour ces élections, 41 listes sont en compétition regroupant des partis politiques, des alliances et des coalitions de candidats indépendants. Un total de 165 sièges à l’Assemblée nationale sont en jeu pour ces législatives anticipées convoquées par le président Bassirou Diomay Faye en septembre dernier.
Le camp du président Bassirou Faye, représenté par la Coalition Pastef, juge important de décrocher une majorité au sein de l’Assemblée, d’au moins 3/5ème des sièges pour mettre en oeuvre son programme de réformes promis par le chef de l’Etat lors de la course pour la dernière élection présidentielle du 24 mars.
Le pourvoi en place voudrait gagner ces joutes pour faire passer quelque 83 projets de loi, 294 projets de décret et 110 projets d’arrêté annoncé en juillet dernier par le Premier ministre Ousmane Sonko. L’opposition, quant à elle, lutte pour éviter que le Pastef ait les pleins pouvoirs durant le mandat de Bassirou Faye, élu au premier tour le 24 mars.
Toutefois, le Pastef doit faire face le jour du 17 novembre à 40 listes, surtout trois grandes coalitions d’opposition que sont Takku Wallu Sénégal (Ensemble pour sauver le Sénégal), menée par l’ancien président Macky Sall,, Jamm ak jarim (La paix et le pouvoir), conduite par l’ancien Premier ministre et candidat malheureux à la présidentielle, Amadou Ba, en tant que tête de liste, et qui est soutenu par le Parti Socialiste, et Sam Sakadu (Tenir sa promesse), la coalition de l’actuel maire de Dakar, Barthélemy Dias, devenu un opposant farouche de Ousmane Sonko.
Takku Wallu Sénégal, avec en tête de liste l’ancien président Macky Sall, regroupe les membres de son parti l’Alliance pour la République (APR), des anciens soutiens de la coalition Benno Bokk Yakaar ainsi que le Parti démocratique sénégalais (PDS) de l’ancien président Abdoulaye Wade.
Ces différents regroupements ont constitué des alliances dans plusieurs départements, à l’instar de la capitale Dakar, pour maximiser le nombre de sièges et imposer un partage du pouvoir à l’actuel régime conduit par Bassirou Faye.
Durant cette campagne, des caravanes des différentes formations politiques ont sillonné les 46 régions du pays afin de convaincre plus de 7,3 millions électeurs appelés à se rendre de nouveau aux urnes après le scrutin présidentiel de mars dernier.
Pour ces législatives, l’opposition actuelle part toutefois divisée et la tache ne lui sera pas facile pour affronter ou battre le parti Pastef qui compte sur le soutien des jeunes, qui attendent beaucoup du pouvoir actuel.
Le parti de l’ancien président Macky Sall, l’Allaince pour la République APR, s’est scindé en plusieurs branches avec la coalition menée par l’ex-Premier ministre Amadou Ba, arrivé deuxième lors de la présidentielle du 24 mars. Même si l’opposition compte utiliser comme principal argument de campagne la lenteur du parti Pastef dans la prise de décision et le lancement des réformes promises, la mission ne lui sera pas aisée pour convaincre les électeurs, estiment les analystes.
Le président Bassirou Faye avait dissous le 12 septembre l’Assemblée nationale suite à l’échec du projet de révision constitutionnelle, pour supprimer deux institutions à savoir le Conseil économique, social et environnemental et le Haut Conseil des Collectivités Territoriales, considérées comme budgétivores.
Pour le pouvoir, ces élections ont une allure de test. En choisissant de faire d’Ousmane Sonko la tête de liste du parti Pastef, face à Macky Sall, le président Bassirou Faye entend capitaliser sur la popularité du Premier ministre pour rallier l’électorat et s’appuyer sur l’espoir impulsé par la victoire du scrutin du 24 mars.
La campagne électorale a débuté avec des accrochages entre les principaux acteurs politiques ce qui a amené le ministère de l’Intérieur à réagir et appeler à la retenue et à la responsabilité des acteurs politiques. Le premier jour de cette campagne a été en effet marqué par l’attaque, dans la nuit du 27 au 28 octobre, du siège d’un parti d’opposition de Kalifa Sall, le « Taxawu Sénégal », dont Barthelemy Dias est membre, par des inconnus qui s’en sont pris à des véhicules, et ont cassé des vitres et déclenché ensuite un incendie.
De même, le convoi du Premier ministre Ousmane Sonko, en campagne pour les législatives, a été attaqué mercredi dernier à Koungueul (centre).
Dans un communiqué, rendu public au lendemain de la première journée de campagne électorale, le ministère de l’intérieur a souligné l’importance du respect, par les leaders de partis politiques et les coalitions de partis engagés dans cette campagne, des valeurs démocratiques et de la cohésion sociale pour garantir une période électorale paisible et respectueuse des droits de tous.
De son côté, le ministère de la Justice a annoncé que des enquêtes seront diligentées suite à des agissements et propos ‘’susceptibles de revêtir une qualification pénale’’ .
De retour samedi de visites à l’étranger, le président Bassirou Diomaye Faye, lui aussi, a abordé la question préoccupante des violences électorales et fait part de son regret et de sa désapprobation face à ces incidents.
« Il est inacceptable qu’un camp s’en prenne à un autre dans un contexte électoral », a dit le président Faye en s’adressant aux différents leaders politiques, mettant l’accent sur la nécessité d’une retenue et d’une responsabilité accrue pour éviter l’escalade des violences.
Selon lui, les divergences d’opinion et les affrontements politiques devraient se traduire par des débats constructifs, dans le respect des valeurs démocratiques sénégalaises, et non par des actes violents qui fragilisent l’unité nationale.
L’actuelle Assemblée nationale, élu en janvier 2022, est dominée par l’ancienne mouvance présidentielle « Benno Bokk Yakaar » (BBY, Unis pour l’espoir) avec 83 députés favorables au camp de l’ex-président Macky Sall (2012-2024).
Le dimanche 17 novembre, les électeurs appuieront-ils le gouvernement en lui octroyant la majorité absolue à l’Assemblée nationale ou bien opteront-ils pour la cohabitation en favorisant l’opposition ? se demandent les observateurs.
Abdelkrim KNINAH