Dakar, 19 nov (APS) – Les 48emes assises de l’Union internationale
de la presse francophone (UPF), ouvertes mardi à Yaoundé, pose le
débat de l’emprise grandissante de l’émotion sur l’information, une
évolution qui amène à donner de plus en plus aux faits et à l’analyse
une importance jugée secondaire.
Prévue pour trois jours, cette rencontre à laquelle participent 400
délégués venus de 69 pays de l’espace francophone, porte sur le thème
« Journalisme d‘émotion, journalisme d’informations ».
« Dans un monde du spontané et de l’instantané, l’information a fini
par être un ressenti transmis, une somme d’impressions », a déclaré le
président de l’Union internationale de la presse francophone (UPF), le
Sénégalais Madiambal Diagne, dans son discours d’ouverture.
Les faits n’intéressent que pour leurs capacités à émouvoir, entraîner
des réactions indignées en cascacade, selon le président de l’UPF.
D’après Madiambal Diagne, « l’analyse et la pensée, essentielles dans
tout exercice démocratique, sont domptées, bien rangées voire
reléguées à des valeurs secondes ».
M. Diagne, posant la problématique qui alimentera les débats au cours
de ces assises, note que la question d’un dysfonctionnement du
journalisme via le rapport à l’émotion « se pose à tous les
professionnels des médias tant le rôle des médias pour comprendre et
analyser de façon lucide est essentielle ».
« La conséquence majeure est une faiblesse du vrai ou du moins une
multiplication des vérités probables », a-t-il ajouté.
Le Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute, venu présider
l’ouverture officielle de cette rencontre, juge que son thème « fort
évocateur en dit long sur les défis qui interpellent les médias pris
au piège de la course à l’audience, happés par l’émotion au risque de
faire dérailler l’information ».
Il a ainsi invité les participants à « tirer avantage des réflexions
pour réinventer de nouvelles pratiques professionnelles ».
La directrice des éditions et des Relations internationales du Monde
diplomatique, Anne Cécile Robert, introduisant le débat par une leçon
inaugurale consacrée à cette thématique, a lui aussi relevé le fait
que les journalistes accompagnent le traitement de l’information par
l’émotion au lieu de prendre une certaine distance.
« Les conséquences peuvent être dramatiques », a-t-elle souligné,
relevant que « ce n’est pas seulement la manipulation de l’émotion mais
l’invasion de l’émotion dans l’espace sociale ».
Les 48emes assises de l’UPF se pencheront sur divers sous-thèmes tels
que « Le photojournalisme : entre information et mise en scène, lorsque
la recherche de l’émotion déforme les faits ». Il est également prévu
une table ronde sur « Journalisme d’investigation : du droit absolu à
l’information ».
Les assises de la presse francophone sont organisées chaque année dans
un pays autour d’un thème qui interpelle l’exercice du métier de
journaliste.