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Côte d’Ivoire-AIP/ Autonomisation : ces lavandières qui bouleversent les habitudes dans les ménages abidjanais (Enquête)


  16 Février      29        Société (45136),

 

Abidjan, 16 fév 2021 (AIP)- La famille des « Fanico », lavandier en Malinké s’est agrandie avec la présence sur le terrain de ces femmes qui écument domiciles et cérémonies pour faire la lessive, le ménage ou la vaisselle moyennant des espèces sonnantes et trébuchantes (l’argent). Une activité qui bouleverse de plus en plus les habitudes de la population abidjanaise.

N’étant pas disponibles ou sous le poids de la fatigue occasionnée par le boulot ou la maladie, des couples ou des célibataires ont recours à ces femmes, pour la plupart analphabètes, qui ont compris que la vie n’est pas de tout repos et qu’il faut se battre pour épauler le mari, pour certaines, dans les charges familiales.

Sanogo Mariam, la trentaine environ, fait partie de cette crème féminine qui, très tôt et durant le week-end, son lave-linge en bois ou en plastique sur la tête, frappe aux portes des clients pour recevoir si possible du linge sale.

Aujourd’hui, elle s’est taillé une réputation en la matière. Depuis sa maison, elle organise des rendez-vous pour se déplacer chez ses clients. Samedi 06 février 2021, Mme Sanogo et sa belle-sœur ont répondu à l’appel de Mme Konaté alitée depuis quelques jours. Mme Sanogo, qui a en charge un mari au chômage et deux enfants à scolariser, ne tremble pas devant une colline d’habits à laver.

Après avoir discuté le coût de sa prestation défini en fonction du type de vêtement, elle reçoit son matériel de travail : de l’eau, du savon, de la poudre de savon et de la javel pour se mettre à l’ouvrage.

« Je lave les hauts (tricots, chemises et débardeurs) à 100 francs CFA. Les pantalons tissus à 50 francs CFA et les jeans à 100 francs CFA. », confie Mme Sanogo, trempée de sueur, et qui, au finish, devra se tirer avec un total de 5350 francs CFA.

Dans le quartier d’Agbayaté, dans la commune de Yopougon, Dame Sanogo est beaucoup sollicitée. Après avoir fini, en deux heures d’horloge, la lessive dans la famille Konaté (de 6h à 8h), elle a rendez-vous avec un autre client qui venait de la joindre au téléphone pour s’assurer de sa présence.

« Avant la fin de la journée, je peux rentrer avec plus de 10 000 francs CFA. Dans le mois, je me retrouve avec un peu plus de 60 000 francs CFA », fait-elle savoir sous l’assistance de son fils d’environ deux ans avec qui elle tourne, les samedis, dimanches et jours fériés.

Le pied de grue au marché de Marcory

Des femmes, non loin du terrain « Vatican » à proximité du petit marché dans la commune de Marcory, font le pied de grue tous les matins. Originaires, pour la plupart, des pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), une dizaine de mères de familles rassemblées sur un regard de connexion électrique, le téléphone suspendu à l’oreille, espèrent recevoir l’appel d’un éventuel client. En attendant ce coup de fil salvateur, dame Ki Aminata, résidente dans le sous quartier d’Anoumabo, mariée et mère d’un enfant, dit avoir abandonné le commerce au profit de la lessive et du ménage.

« Avec un gain mensuel de 50 000 à 60 000 francs CFA, je m’en sors bien dans ce boulot de lavandière », se réjouit Ki Aminata qui a réussi à se fidéliser avec au moins cinq familles. Elle ambitionne de réaliser des économies pour s’offrir un magasin de vente de produits cosmétiques.

En plus de la lessive et du ménage, ces femmes sont aussi sollicitées pour la vaisselle lors des cérémonies. Pour un montant d’environ 5 000 à 15 000 francs CFA, elles assurent la propreté de la maison et parfois les couverts ayant servi à la réception des convives, rapporte Kady Doumbia épouse Konaté.

Des élèves dans la danse

Femme d’affaires, toujours partie pour son business, Loba Célestine n’a pratiquement pas le temps de faire sa propre lessive. Un week-end, elle aperçoit devant sa porte trois jeunes filles munies de leur bois à linge sur la tête qui lui proposent si possible de laver ses vêtements.

Satisfaite du travail accompli le premier jour, Mme Loba a gardé le contact avec Mariam, Aïcha et Kady, respectivement en classes de 5e, 4e et de 3e. Habitantes de la commune d’Adjamé, elles avalent tous les samedis ou dimanches en quinze, des centaines de kilomètres pour de se rendre au domicile de Mme Loba à Yopougon Andokoi. Ces filles, dont l’âge varie entre 15 et 20 ans, fréquentent le milieu depuis bientôt six mois.

« Nous nous organisons à trois pour aller plus vite. Cela nous permet de travailler chez plusieurs clients. Sur les deux jours du week-end, nous pouvons rassembler la somme de 20 000 frances CFA. Ce qui nous permet de subvenir à nos besoins, d’assurer nos cours et soutenir nos parents », explique Mariam

Les prestations diversement appréciées par la clientèle

Journaliste et résidant dans la commune de Port-Bouët, précisément au quartier Vridi-cité, Coulibaly Franck sollicite ces femmes depuis 2015. Il a recours à ces dernières pour décharger un tant soit peu son épouse de certaines tâches ménagères dont la lessive. Il juge le coût des prestations raisonnable comparativement aux blanchisseurs et pressings. Par contre, il condamne la mauvaise utilisation des détergents, notamment l’eau de javel qui détériore quelquefois ses vêtements et ceux de son épouse et des enfants.

Célibataire par le passé, Joseph N’guessan, professeur de musique s’offrait les services de ces dames. Celle qu’il sollicitait au moins une fois dans la semaine faisait le ménage, la cuisine et la lessive. Elle était payée à 2500 francs CFA et percevait la somme de 10 000 francs CFA le mois.

« Les pressing et les blanchisseries se focalisent sur la lessive et le repassage. Alors que ces femmes à elles seule, te font la lessive, la vaisselle, et le ménage. », fait observer M. N’guessan qui salue la ponctualité et le respect des engagements pris par ces dernières.

Dame Agbé Léa a recours à ces lavandières, surtout quand elle se sent fatiguée. Elle apprécie la rapidité et le cœur que certaines y mettent pour faire un travail de qualité.

« Ce n’est pas tout le monde qui lave ça propre hein. Il y a en a qui veulent faire rapidement pour quitter là. Je n’apprécie pas trop vraiment. C’est quand je suis coincé. Il y a en a qui lave avec le cœur. Je les préfère aux servantes parce qu’avec elle, Il n’y a pas trop de chose qui vous lie. Pas trop d’histoire entre vous. Les problèmes et les malentendus naissent quand elles sont à la maison ».

Exerçant de manière informelle, ces lavandières travaillant parfois par affinité éprouvent des difficultés dans l’accomplissement de leur tâche.

« Bien qu’ayant convenu du montant à payer après prestation, certains clients nous accusent à tort pour ne pas payer la totalité de la facture. Soit les habits ont été mal lavés, soit ils ne sont pas propres ou tu les as usés. », déplore Mme Ki.

Vers la création d’une filière de formation du personnel de maison

La directrice de la formation dans les Instituts de formation et d’éducation féminine (IFEF), Dembélé Mariam, révélait, mercredi 09 septembre 2020 qu’une réforme profonde de ces centres est en cours pour renforcer l’employabilité des femmes et des jeunes filles.

Cette réforme va nécessiter la diversification de l’offre de formation et va prendre en compte notamment les métiers liés au numérique, les métiers du secteur agricole, la formation du personnel de maison, a-t-elle précisé.

Parlant de la formation du personnel de maison, l’instauration de cette filière va également enclencher le processus de la création d’un cadre légal. Ces femmes et les filles qui sortiront de l’IFEF vont désormais exercer dans un secteur bien organisé.

Comme cela se fait dans certains pays, ce personnel pourrait être formé sur l’emploi correct des ustensiles de nettoyage et l’utilisation écologique des produits chimiques. La formation de ces « spécialistes de l’aide ménagère » pourrait également être axée sur la rapidité et la qualité du travail.

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